Printemps en Mediterranée
Printemps en Méditerranée.
par un militant du MRAP de Dunkerque
Albert Camus « l’africain » aurait aimé sans doute la révolution des jeunes d’Egypte et de Tunisie. Il l’aurait sans doute laissé se déployer dans sa fulgurance. (1)
Il n’aurait sans doute pas agité le spectre de l’anarchie comme certains aujourd’hui agitent le chiffon rouge de l’islamisme.
Le mot d’ordre « dégage » entendu sur la place Tahrir et les rues de Tunis est parfaitement, purement, radicalement foucaldien. Il pointe en effet, sans accompagnement idéologique le pur rapport du sujet au pouvoir. « L’homme qui se lève est finalement sans explication », disait Foucault. « La révolte tire d’elle-même sa vérité ». (2)
« Le mal ne m’étonne pas » disait De Castillo, « ce qui m’étonne c’est qu’au cœur des cruautés ,des hommes se lévent pour dire non ». Le problème alors, disait Paul Ricœur n’est plus de savoir d’où vient le mal, mais comment le combattre.
Et après ? Après avoir enterré les milliers de martyrs, nettoyé et repeint la place Tahrir, que va-t-il se passer ?
Accueillons d’abord le printemps avant de nous projeter en hiver. Une jeunesse s’est mobilisée sans violence avec un courage inouï et par la seule force de sa révolte a fait basculer trois dictatures. Elle peut être fière de cette liberté retrouvée. Ne boudons pas notre plaisir.
Et après ? Camus aurait sans doute conseillé aux jeunes « la mesure », en leur disant ce que son père « Cormery » disait : « Un homme ça s’empêche »(1).Aucune fin ne justifie les moyens, L’homme qui se révolte doit être aussi celui qui se résiste.
Beaucoup de révolutions ont échoué pour n’avoir pas entendue ce conseil.
La française, en premier qui, à cause de la terreur a fait la promotion de l’empire et de la « restauration ». Prés d’un siècle de replis réactionnaires avant de retrouver la République et la Démocratie.
Lactance , humaniste latin au 3éme siècle ,disait déjà qu’en toutes circonstances l’homme doit faire preuve d’humanité. Même poussées par une faim extrême, les bêtes sauvages n’en épargnent pas moins les animaux de leur espèces.les loups ne se mangent pas entre eux. « Combien plus l’homme se doit il d’épargner l’homme son semblable et l’aimer ».
Tandis que le vent de révolte a gagné en Lybie et embrase la Syrie et le Yémen, l’heure n’est pas au bilan mais au soutien de tous les peuples du monde, de leur opinion publique pour que de nouveaux printemps fleurissent tout autour de la méditerranée et plus loin dans le golfe persique et les autres continents. Pour que la solidarité internationale soutienne les nouvelles démocraties et que triomphe la Liberté retrouvée.
« J’opte pour le salut ! », « Les révolutions : la tunisienne du jasmin et l’égyptienne de Midan al Tahrir , sans oublier la libyenne inaugurent sans doute une nouvelle ère arabe. Elles viennent d’acter la volonté populaire de se mettre debout et penser le monde par soi même. En quelques jours, l’arabe se découvre capable de volonté, de résistance ; il se sent utile, il refait société, il se pense capable de décider du monde dans lequel il aimerait vivre. Il se veut capable de juger ses dirigeants et leur intégrité, de contester leurs choix et leurs alliances, et notamment avec un occident qui devrait se presser de mettre fin à la politique des « deux poids, deux mesures » concernant la question palestinienne et son traitement injuste et humiliant pour tous les arabes….Quelque soit l’avenir de ces révolutions, il est sûr que désormais l’arabe, où qu’il soit, vient de récupérer sa dignité et l’estime de soi. C’est déjà beaucoup. (3)
Texte écrit par un militant du MRAP de Dunkerque le 26 Octobre 2011
(1) Albert Camus : « Le premier homme »
(2) Jean Birnbaum : Le monde magazine n° 75.
(3) Nabil El-Haggar : universitaire